Le corps diplomatique en émoi : Kamel Morjane serait-il l’objet de la colère

Le syndicat du corps diplomatique est en colère. En ce mercredi 21 août décision a été prise de porter le brassard rouge au sein des missions diplomatiques et consulaires à l’étranger et au ministère des Affaires étrangères où un arrêt de travail et un sit-in dans le Hall du département ont été observés entre 10h et 10h30 du matin.

L’objet de la colère : les bruits parvenus aux oreilles des membres du syndicat concernant des nominations politiques et partisanes dans le cadre du mouvement annuel des chefs des missions diplomatiques. Ce mouvement n’a pas été rendu public, alors que normalement il devait être annoncé dès l’achèvement de la Conférence annuelle des chefs de missions diplomatiques, permanentes et consulaires. La clôture de cette conférence a eu lieu le 2 août dernier sous la présidence du chef de l’Etat intérimaire, Mohamed Ennaceur.

Comme de tradition, les chefs de missions touchés par le mouvement n’ont pas pris part à la Conférence. Une douzaine de postes sont concernés. Il s’agit des missions permanentes de Tunisie auprès des Nations Unies à New York et à Genève et des ambassades tunisiennes auprès de l’Algérie, de l’Arabie Saoudite, du Qatar, de la Russie, de la République Tchèque, de l’Argentine et du Pakistan ainsi que des consulats de Tunisie à Annaba et à Rome. D’autres postes pourraient être touchés.

Si le secret le plus total est de rigueur concernant les personnalités pressenties en dehors du corps diplomatique pour remplir certains de ces postes, il semble que la goutte qui ait fait déborder le vase est en rapport avec un ministre actuellement en fonctions proposé pour une fonction diplomatique.

Il s’agit de l’actuel ministre de la fonction publique et de la modernisation de l’administration Kamel Morjane qui aurait été proposé comme ambassadeur représentant permanent de la Tunisie auprès de l’Organisation des Nations Unies à New York. Ce poste est actuellement vacant depuis le départ début 2019 de son titulaire, Khaled Khiari nomme directeur général Amérique-Asie- Pacifique avant d’être désigné comme sous-secrétaire général des Nations Unies.

A plus de 71 ans (il est né en mai 1948) Morjane n’est plus éligible à une fonction dans l’administration. De plus étant président du Conseil national du parti Tahya Tounes, la formation du chef du gouvernement Youssef Chahed, sa nomination ferait partie des nominations partisanes ce qui altérait le caractère de neutralité du corps diplomatique et son souci d’être à égale distance de tous les acteurs de la scène politique.

Dans son communiqué le syndicat du corps diplomatique estime que l’insistance des décideurs pour imposer des nominations extérieures au corps sur la base de favoritisme, di népotisme et de quotas partisans confirme la volonté de faire main basse sur les missions diplomatiques pour servir les intérêts partisans étroits dans cette situation électorale délicate et transitoire.

« Ces pratiques, qui nous renvoient aux violations que des diplomates ont subies sous le régime de Ben Ali, sapent la neutralité et le professionnalisme de ce corps souverain ». Le syndicat exhorte toutes les institutions constitutionnelles, de la société civile et des forces actives du pays de ne pas porter atteinte à l'impartialité du corps et d'éviter les tensions politiques.

Si ses revendications ne sont pas prises en compte, le Syndicat se dit prêt à l’escalade par tous les moyens légaux y compris une « grève ouverte » au sein des missions diplomatiques et consulaires concernées par les nominations politiques.

La balle est actuellement dans le camp du  président de la République par intérim Mohamed Ennaceur à qui il revient selon la Constitution de procéder aux nominations dans le corps diplomatique et consulaire. Informé des observations du Syndicat, il semble prendre son temps. Ce dernier a bon espoir qu’il sera entendu.