Les raisons du limogeage du ministre de la justice Mohamed Salah Ben Aissa
Le chef du gouvernement Habib Essid a décidé de démettre Mohamed Salah Ben Aissa de ses fonctions de ministre de la Justice et de le remplacer provisoirement par l’actuel ministre de la Défense Farhat Horchani. Le communqué rendu public, dans l'après-midi de ce mardi 20 octobre 2015, n'explique pas les raisons de ce limogeage. Ben Aissa avait refusé de se présenter devant la chambre des députés pour examen du projet de loi organique relative au Conseil supérieur de la magistrature en vue de son adoption au cours de la séance plénière prévue pour aujourd’hui, mardi 20 octobre, malgré les injonctions d’Essid. Il a expliqué, dans une interview accordée à Mosaique FM, qu'il avait pris la décision de démissionner de son poste la veille à l'issue de la programmation d'une séance plénière relative au projet de loi portant sur la création du conseil supérieur de la magistrature, pour approbation. Il ne voulaitt pas défendre unprojet dont il n'éait pas convaincu.
Il a ajouté qu'il a été informé de la tenue de la plénière d'aujourd'hui par un des agents de l'assemblée des représentants du peuple, tardivement et que cet acte ne peut pas se faire de la sorte, à un membre du gouvernement.
Toutefois, la révocation du ministre de la Justice était déjà dans l’air en raison de son "manque d’autorité et ses atermoiements dans la gestion de dossiers très sensibles" comme celui du terrorisme. Les accusations portées contre les magistrats, notamment, les juges d’instruction du pôle antiterroriste ont écorné l’image de la justice tunisienne en l’absence d’une réaction de la part du garde des sceaux.
Le comité de défense de Chokri avait nommément accusé le juge qui instruit l’affaire allant jusqu’à demander "sa traduction devant la justice pour connivence avec le terrorisme". Besma Khalfaoui avait affirmé avoir rencontré le ministre de la Justice pour demander le remplacement du juge en charge du dossier mais que ce dernier s’était contenté de répondre qu’il ne pouvait pas le faire. La réaction des magistrats fut immédiate, refusant, dans une première étape de reprendre leur travail au pôle avant de s’en raviser.
Sur un autre plan, l’arrestation puis la libération de certains « gros poissons » du trafic comme les frères « ouchouchas » à Ben Gardane, a été très critiquée et a déplu, parait-il, jusqu’aux plus hautes sphères de l’Etat décidé à en découdre avec le trafic et l’économie parallèle qui a atteint des proportions alarmantes.
Mohamed Salah Ben Aissa a certainement payé son impudence contre l’ambassadeur américain quand il avait déclaré l’avoir remis à sa place, affirmant devant la commission des droits de l’homme de l’Assemblée des représentants du peuple, que ce dernier a dépassé les limites en cherchant à interférer dans les législations qui concernent le trafic humain. Il a manqué de diplomatie et fait entorse à l’obligation de réserve.
Sa déclaration de vouloir abroger l’article 36 du code pénal qui criminalise l’homosexualité a soulevé de vives réactions, dont notamment celle du président de la République Béji Caid Essebsi alors en visite en Egypte et qui a complètement désavoué le ministre.
Ce limogeage va, certainement, entraîner un remaniement ministériel qui ne va pas trop tarder. En attendant le retour du Président de la République de sa visite en Jordanie.