L’UMA risque-t-elle de faire les frais d’une querelle tuniso-tunisienne à propos du passeport diplomatique de Taieb Baccouche
Taieb Baccouche, désigné Secrétaire général de l’Union du Maghreb Arabe (UMA) en 2016 a achevé ses deux mandats en 2022, mais il est toujours en poste sous prétexte qu’aucun successeur n’a été nommé à sa place.
Le poste revient à un Tunisien, selon un accord non écrit, convenu au Sommet constitutif de Marrakech, entre la Tunisie et le Maroc, ce dernier a obtenu le siège du secrétariat général à la condition que la Tunisie obtienne le poste de Secrétaire général, ce qui fut entériné par les autres membres, l’Algérie, la Libye et la Mauritanie.
Les secrétaires généraux qui se sont succédé depuis lors sont tous tunisiens. Ce furent successivement Mohamed Amamou, Habib Boulares, Habib Ben Yahia et Taieb Baccouche. Seule la nomination du premier a été entérinée par un Sommet, les deux suivantes ont été approuvées par la conférence des ministres des Affaires étrangères puisqu’aucun sommet ne s’est réuni depuis celui de Tunis en 1994.
Le dernier, Taieb Baccouche n’a pas eu cette chance puisqu’il n’a pas réussi durant ses deux mandats à réunir les ministres des Affaires étrangères sous son égide.
Depuis la rupture des relations diplomatiques entre l’Algérie et le Maroc en août 2021, l’UMA est en mort clinique. L’ensemble régional a reçu ensuite un rude coup de massue avec la crise tuniso-marocaine ayant suivi l’accueil à Tunis par le président de la République Kaïs Saïed du chef de la « RASD » et du Polisario, Brahim Ghali à l’occasion du Sommet de la TICAD-8 en août 2022.
Depuis lors les ambassadeurs respectifs ont été rappelés en consultation et les relations ont été rétrogradées au niveau de chargés d’affaire. Secrétaire général de l’organisation dont le siège se trouve dans la capitale marocaine Rabat, le Tunisien Taieb Baccouche s’est retrouvé ainsi dans une position intenable.
A un moment il avait rêvé de réunir les ministres des affaires étrangères des cinq pays de l’UMA lors du Sommet arabe prévu à Alger en novembre 2022. Mais il a dû déchanter puisqu’il n’a pas été invité lui-même à ce Sommet par les hautes autorités algériennes.
S’est-il accroché à son poste amenant les autorités tunisiennes à ne pas lui renouveler son passeport diplomatique ? La question se pose si la rumeur relayée par certains médias se confirme.
On affirme que le secrétaire général de l’UMA, faute de disposer de son document de voyage, a dû renoncer à se rendre au Sommet de l’Union Africaine qui se tient à Addis Abeba les 17 et 18 février. Ce Sommet devrait être présidé par un pays membre représentant le groupe Afrique du Nord. Après des tractations, c’est la Mauritanie, pays membre de l’UMA qui devra présider ce Sommet.
La Tunisie aurait pu d’ailleurs présider ce Sommet, un privilège qu’elle n’a pas obtenu depuis le Sommet africain de Tunis de 1994, mais selon le quotidien français le Monde, elle s’est discréditée auprès du continent après les déclarations incendiaires du président Kaïs Saïed stigmatisant les migrants subsahariens sur son sol. «Un discours haineux à caractère raciste »,selon les mots du président de la commission de l’UA, le Tchadien Moussa Faki Mahamat.
Cette querelle tuniso-tunisienne qui n’a pas raison d’être car Taieb Baccouche en tant qu’ancien ministre des Affaires étrangères dispose du passeport diplomatique à vie aurait-elle pour conséquence de faire perdre à la Tunisie un poste international qui lui revient.
On sait que les autres pays lorgnent ce poste. Alger a toujours plaidé pour une «rotation» de la fonction de secrétaire général entre les Etats membres, alors que la Mauritanie veut nommer un des siens à la tête de l’organisation.
Le risque est grand que si Taieb Baccouche déserte son poste, l’UMA ne tombe en obsolescence. L’organisation y perdra. La Tunisie surtout.
Les personnes passent, mais le prestige de l’Etat doit être préservé. Alors que le 17 février 2024 coïncide avec le 35ème anniversaire de la fondation de l’ensemble maghrébin, il est temps d’un sursaut pour que le rêve du Maghreb uni reste vivace. La Tunisie qui porte le flambeau doit veiller à ce qu’il soit préservé.
A défaut, le poste et l’organisation feraient les frais d’une querelle tuniso-tunisienne à propos du passeport diplomatique de Taieb Baccouche. Ils ne le mériteraient pas.
RBR
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