Trump-Al-Qods : la position tunisienne faible, honorable?

Trump-Al-Qods : la position tunisienne faible, honorable?

 

Le président de la République a décidé de convoquer l’ambassadeur des Etats Unis à Tunis pour lui faire part de la désapprobation de la Tunisie vis-à-vis de la décision du président américain de reconnaître la ville sainte d’Al-Qods comme capitale d’Israël, une décision jugée et illégitime.

Dans les usages diplomatiques c’est le degré le plus élevé de protestation qu’un Etat peut faire vis-à-vis d’un autre dans la série des démarches qui peuvent être envisagées. Il ne reste en effet que le rappel de l’ambassadeur ou la rupture des relations diplomatiques, deux décisions extrêmes auxquelles on n’a recours que lorsque le conflit atteint son summum et concerne les relations entre les deux Etats ce qui n’est pas le cas dans l’affaire d’Al-Qods, une question qui ne concerne pas directement les rapports entre Tunis et Washington.

Le chef de l’Etat ne s’est pas contenté de cela, il a adressé en outre une lettre de soutien très forte au président palestinien Mahmoud Abbas dans laquelle il a réaffirme le soutien absolu de la Tunisie à la cause palestinienne et son entière solidarité avec le peuple palestinien suite à l’annonce de la décision américaine. “En cette conjoncture difficile, tous les pays arabes et musulmans et toutes les forces éprises de paix doivent agir en toute urgence pour éviter que des décisions similaires soient prises à l’égard de la ville d’Al Qods, qui constitue une partie intégrante des territoires occupés depuis 1967”, lit-on dans le message présidentiel.

Béji Caïd Essebsi souligne que “la prise d’une telle décision fait preuve de partialité manifeste en faveur d’Israël et d’infraction aux Chartes internationales rendant difficile la relance du processus de paix. Une décision qui contribue aussi à raviver les tensions et à déstabiliser la région, outre le fait qu’elle constitue une provocation qui offense les sentiments de la Oumma arabe et islamique”.

Estimer dès lors que la position tunisienne vis-à-vis de cette question comme certains l’ont dit ou l’ont laissé entendre est faible ne reflète pas la réalité. Certes le communiqué publié par le ministère des affaires étrangères tout de suite après le discours de Donald Trump dans lequel la Tunisie a fait part de « sa profonde préoccupation » pour la décision de « l’administration américaine » a donné l’impression d’une position qui semblait en deçà des sentiments des Tunisiens car on n’y trouvait même pas la dénonciation ou la condamnation à laquelle on était habitué. De plus le chef de la Maison Blanche n’y est pas nommément désigné alors que c’est lui qui est à l’origine de cette décision qu’il a tenu lui-même à annoncer contre l’avis de certains des membres influents de son administration.

La démarche du président de la République de convoquer en personne le chef de la mission américaine à Tunis pour lui dire de vive voix la désapprobation de la Tunisie est venue corriger le flottement des premiers instants que le ministre des affaires étrangères Khémaies Jhinaoui qui se trouvait en mission en Indonésie s’est évertué, d’ailleurs, à rectifier en « condamnant »de façon claire la décision du président américain.

D’aucuns font le parallèle entre cette position et celle prise par le président Bourguiba en 1985 suite au bombardement par l’aviation israélienne de la ville de Hammam Chott. On rappelle que l’ancien chef de l’Etat avait convoqué l’ambassadeur américain pour lui dire qu’il romprait les relations diplomatiques si son pays userait du véto au Conseil de Sécurité des Nations Unies contre la résolution tunisienne condamnant l’attaque israélienne contre la souveraineté tunisienne. Il s’agit dans le cas d’espèce d’une question relevant des relations tuniso-américaines. D’ailleurs Washington s’est abstenu au cours du vote permettant à la résolution tunisienne d’être adoptée.

On peut estimer dès lors que la position tunisienne dans la conjoncture actuelle a été honorable. Elle est conforme à l’attachement des Tunisiens à la cause palestinienne et aux droits des Palestiniens sur la ville sainte d’Al-Qods.

Votre commentaire