Tunisie : comment les tarifs douaniers de Trump menacent la filière huile d’olive

En Tunisie, l’huile d’olive occupe la première place parmi les produits alimentaires exportés. Les États-Unis, étant l’un de ses marchés clés à l’international, le projet de hausse des tarifs douaniers prévu par Washington est suivi de très près par les acteurs de la filière.
Alors que la période de grâce de 90 jours accordée en avril dernier par les États-Unis à l’ensemble des pays visés par des taxes commerciales additionnelles prendra fin en juillet, la filière tunisienne de l’huile d’olive, pilier des exportations agricoles du pays, se retrouve à nouveau sous pression.
Dans un rapport publié le jeudi 19 juin, l’Observatoire tunisien de l’Économie (OTE) avertit que ce secteur stratégique pourrait éventuellement être affecté de deux manières par l’application de ces nouveaux tarifs. Une perte de compétitivité sur le marché américain
Le pays de l’Oncle Sam est en effet le principal débouché pour l’huile d’olive tunisienne, comptant pour plus de 28 % des expéditions en volume et près de 29 % en valeur.
Les données compilées sur la plateforme Trade Map indiquent ainsi que la Tunisie a exporté 211 525 tonnes de la denrée, générant 1,67 milliard $ de recettes en 2024, dont 58 234 tonnes d’une valeur de 480 millions $ absorbées par les USA.
Dans un scénario d’application des nouveaux droits de douane, la Tunisie qui se verrait appliquer un tarif de 28 % pourrait voir sa compétitivité réduite par rapport à l’Espagne, l’Italie, la Grèce et le Portugal, respectivement 1er, 2ème, 6ème et 7ème fournisseur sur le marché américain, qui subiront des taxes de moindre ampleur (20 %), en tant que pays membres de l’Union européenne.
Par ailleurs, la filière tunisienne sera moins compétitive par rapport à d’autres exportateurs émergents comme la Turquie, l’Argentine et le Maroc, envers qui les tarifs seront encore beaucoup plus cléments (10 %). Un effet domino avec l’Europe
Outre cette perte directe de compétitivité, la filière tunisienne pourrait également subir des effets secondaires à travers les liens commerciaux avec ses partenaires en Europe.
D’après l’OTE, si les exportations italiennes et espagnoles vers les États-Unis baissent du fait des surtaxes qui leur sont aussi imposées, ces pays pourraient à leur tour réduire leurs achats d’huile tunisienne en vrac, qu’ils utilisent majoritairement pour le reconditionnement et la réexportation.
Les données compilées sur la plateforme Trade Map indiquent par exemple qu’en 2024, ces deux pays européens ont absorbé à eux seuls près de 53 % des expéditions de la filière tunisienne en volume, soit près de 111 750 tonnes d’huile d’olive.
L’impact serait donc double pour les producteurs tunisiens, qui pourraient être confrontés à la fois à une baisse de leurs exportations vers les USA, l’Espagne et l’Italie. Ensemble ces trois pays concentrent environ 80 % des expéditions tunisiennes d’huile d’olive.
Dans ce contexte, l’Observatoire tunisien de l’Économie recommande de diversifier les débouchés commerciaux. « Cette situation souligne la nécessité d’accélérer la diversification des marchés à l’export, en s’orientant notamment vers les pays avec lesquels nous enregistrons une balance commerciale déficitaire, ainsi que vers les marchés émergents de l’huile d’olive en Afrique et en Asie.
In fine, il est important de devenir moins dépendant des marchés spécifiques d’exportation, mais aussi de réduire nos besoins en importations et garantir la souveraineté », souligne le centre de recherche.
(Agence Ecofin)
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