Tunisie: D’innombrables dégradations sans riposte
Il s’agit en fait d’une appréciation élaborée par les agences de notations suite à des critères prédéfinies pour estimer le risque que doit prendre en compte les investisseurs à travers l’attribution d’une note. Ainsi ces agences de notation ont la lourde tâche d’évaluer le risque de solvabilité et ont une influence prépondérante dans l’attractivité des investisseurs.
La relation de la Tunisie avec ces agences a commencé en janvier 1994 avec l’agence de notation Japonaise rating and investment information « R&I » puis, on a enchainé avec les trois mousquetaires anglo-saxon à savoir Moody’s en avril 1995, Fitch rating en septembre 1995 et enfin Standard & Poor’s « S&P » en avril 1997.Sauf que, depuis la révolution et surtout après le 23/10/2011 toutes les agences ont revu à la baisse la note souveraine de l’Etat et aucune des recommandations assignés par ces dernières n’a été pris en compte.
En effet, depuis les élections du 23 octobre, S&P a dégradée la note souveraine de la Tunisie à deux reprises, une première fois le 23/05/2012 et une seconde fois le 19/02/2013 et elle a été suivie par Fitch le 11/12/2012 et Moody’s le 28/02/2013 et même l’agence R&I qui est la plus souple a révisée à la baisse la note de la Tunisie en février 2013. Mais le problème ici n’est pas dans la dégradation elle même mais plutôt dans la réaction du gouvernement qui ne cesse de négliger le rôle de ces instances et nier la vérité de la fébrilité de notre économie causée principalement par la mauvaise gouvernance.
En effet, quand Standard and Poor's relègue la note de la Tunisie en catégorie spéculative en mai 2012 et elle a justifié cette dégradation causée principalement par les incertitudes politiques qui persiste, la rédaction de la constitution qui traine et les élections qui ne cessent d’être reportée aucun responsable à l’époque n’est sorti de son silence et a dit qu’il faut assumer notre responsabilité et que si on cherche à minimiser l’impact de la dégradation ça serait une grave erreur. Au contraire ils cherchaient un bouc émissaire pour lui coller leurs incompétences et ils l’ont trouvé dans la personne du gouverneur de la banque centrale qui a été limogé deux mois plus tard.
Pire encore ils négligent totalement toutes les recommandations de S&P et au lieu de les prendre en considération ils continuent à travailler dans le brouillard. Et à partir du moment où on raisonne de cette manière les conséquences ne se font pas attendre, l’accès au marché financier est devenu très difficile, des taux d’intérêt plus importants , baisse des IDE …tout ça va engendrer des défis sociaux économiques énormes à long terme.
Donc avons-nous tiré les bonnes leçons de nos récentes dégradations financières ?
La réponse à la question est Non, car jusqu’à aujourd’hui nous n’avions ni une date claire et nette pour la finalisation de la constitution, la haute instance des élections n’est pas encore fonctionnelle donc,automatiquement pas de date précise pour les élections et un calendrier qui est en perpétuel mutation,ce qui engendre un flou total pour toutes les grandes échéances politiques à venir et ce qui nous ramène a dire que depuis la première dégradation de Fitch en février 2012 à l’ère Jebali aucune mesure n’a été prise pour remédier à cette hémorragie qui nuit énormément à l’économie du pays et qui aura certainement des répercutions néfastes à long terme.
Faut-il douter des agences de notation ?
Cependant ces agences ont fortement manqué de clairvoyance ces dernières années. Elles n'ont pas vu venir la crise des subprimes et l’effondrement de Lehman brothers et elles accordaient la note maximale à des produits "toxiques"c’est le cas par exemple de S&P qui a été condamnée pour notation "trompeuse" en Australie entraînant une perte nette de 12,9 millions d'euros et pour se défendre S&P a eu comme réponse « La notation est un art, pas une science ». Une réponse qui suscite beaucoup d’interrogation.
Mohamed Aziz Boukef