25ème anniversaire du décès de Hédi Nouira : un Homme d’Etat d’exception

25ème anniversaire du décès de Hédi Nouira : un Homme d’Etat d’exception

l y a 25 ans, le 25 janvier 1993, jour pour jour s’est éteint un homme d’Etat exceptionnel. Hédi Nouira était le Premier ministre de Bourguiba pendant plus de dix ans et son dauphin constitutionnel. Il était le fondateur et le premier gouverneur de la Banque centrale de Tunisie et à ce titre le créateur du dinar tunisien. Il fut aussi l’un des membres du premier gouvernement de l’indépendance. Militant du Néo Destour, il accéda au poste de Secrétaire général du PSD, fonctions qu’il cumula avec elles de Premier ministre de 1970 à 1980.

Promoteur d’une économie libérale, la décennie au cours de laquelle il avait dirigé le gouvernement, il a permis à la Tunisie de consolider les bases de son économie et à former sa large classe moyenne qui constitue le socle de sa stabilité jusqu’à maintenant.

Né le 5 avril 1911 à Monastir, issu d’une famille aisée, Hédi Nouira a fait ses études dans sa ville natale car il n'arrive pas à s'inscrire au Collège Sadiki de Tunis. Collège Sadiki de Tunis. Il suit des études secondaires à Sousse où il est d'abord attiré par le football, et s’inscrit à l'Étoile sportive du Sahel. Il se rend ensuite en France où il passe son baccalauréat à Paris en 1931.

En 1934, il assiste à la création de la première cellule du Néo-Destour en présence de Habib Bourguiba. Il en devient un militant actif tout en suivant une ligne libérale. Il se réinstalle ensuite en France, où il suit des études qui le mènent à une licence en droit. Il poursuit dans le même temps son parcours militant en adhérant à l'Association des étudiants musulmans de l'Afrique du Nord (AEMNA) puis en créant le Comité de défense des libertés en Tunisie dont il devient le secrétaire général.

En rentrant en Tunisie en 1938, il continue son engagement politique et se fait emprisonner à la prison civile de Tunis, à celle de Téboursouk, au Fort Saint-Nicolas de Marseille, avec Bourguiba et d'autres militants du Néo-Destour, et à la prison Montluc à Lyon. Avant de rentrer en Tunisie en février 1943, il est placé en résidence surveillée à Rome.

La période passée à Saint-Nicolas le rapproche davantage de Bourguiba. Hédi Nouira passe quatre ans à contribuer à la restructuration et à la préparation du Néo Destour pour la libération du pays et rentre dans la clandestinité avant de devenir un militant modéré et diplomate à partir de 1948.

C'est à partir de 1949 que Nouira consolide son statut à l'étranger en devenant l'interlocuteur privilégié de la plupart des membres du Parti socialiste français et du Mouvement républicain populaire. Il exploite ainsi ses relations pour sensibiliser davantage ces partis à la cause tunisienne et pour présenter les points de vue du Néo-Destour.

En avril 1952, il refuse de prendre part au gouvernement de Slaheddine Baccouche, il est alors exilé dans le sud tunisien puis assigné à résidence en 1953. Cette affaire marque son parcours. Il rédigera nombre d'articles pendant les quatre années suivantes, principalement dans Mission, un hebdomadaire dont il devient l'éditorialiste attitré. Libéré, il devient, en août 1954, ministre du Commerce dans le gouvernement de Tahar Ben Ammar avant de se voir confier le nouveau ministère des Finances dans le premier gouvernement de l’indépendance présidé par Habib Bourguiba.

Le premier président de la République lui confie la mission de créer et structurer la Banque centrale de Tunisie qu'il dirige de sa fondation en 1958 à 1970. Il fait partie du Bureau politique du Néo-Destour durant cette période. En 1970, voulant donner un nouvel élan pour accélérer la mutation du pays et le sortir de la politique de collectivisation mise en œuvre par l’ancien ministre de l’économie Ahmed Ben Salah Bourguiba nomme Nouira Premier ministre le 2 novembre et le charge de réformer l'économie nationale.

Durant dix ans, Nouira reste en poste, renforcé par l'embellie économique et le progrès social, bien que de grandes crises secouent la Tunisie : le congrès du Néo-Destour à Monastir en 1971, la crise au sein de l'université et les émeutes du 26 janvier 1978. D’abord proche du secrétaire général de l’UGTT Habib Achour dont l’alliance lui a servi à s’opposer à l’union entre la Tunisie et le Libye signée par Bourguiba et le leader libyen Moammar Kadhafi les relations entre les deux hommes s’enveniment et connaissent leur paroxysme avec les émeutes du 26 janvier 1978.

Le 23 avril 1980, victime d'une attaque cérébrale ayant entraîné une hémiplégie, Nouira quitte définitivement la vie politique peu après l'avortement du projet d'union entre la Tunisie et la Libye qui a été, en quelque sorte, à l'origine de l'attaque d'un commando tunisien entraîné par la Libye sur la ville de Gafsa. Mohamed Mzali lui succède.

 À sa mort, il est inhumé à Monastir. Une rue de Tunis, la rue de la Monnaie où se trouve le siège de la BCT est rebaptisée à son nom.

En se prononçant sans complexe pour une politique économique libérale ouvrant la voie à l'initiative privée et à l'économie de marché, il jette les prémices de l'insertion de la Tunisie dans l'économie mondialisée.

Le CIPED , centre de prospective économique que préside son lointain successeur Taoufik Baccar lui a rendu hommage à l’occasion du 25ème anniversaire de son décès en écrivant : « Premier Ministre, il se prononce sans complexe pour une politique économique libérale ouvrant la voie à l'initiative privée et à l'économie de marché, sort le pays des impasses idéologiques et jette les prémices de l'insertion de la Tunisie dans l'économie mondialisée, mais tout en marquant son projet, grâce à son fameux losange (peu de riches au sommet, peu de pauvres à la base et une vaste classe moyenne au cœur), par une volonté d’élargir la répartition de la richesse dans le pays.

HEDI NOUIRA est en un mot, un visionnaire qui forgera les bases de l’économie tunisienne et une figure centrale vers laquelle devraient se retourner les politiciens d’aujourd’hui, en quête d’idées et de courage politique. »

 

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