Editorial du journal Le Monde : la victoire de Kaïs Saïed lourde d’interrogations

Editorial du journal Le Monde : la victoire de Kaïs Saïed lourde d’interrogations

 

« La victoire du conservateur Kaïs Saïed à la présidence tunisienne est lourde d’interrogations » tel est le titre de l’éditorial que consacre ce lundi le quotidien français le Monde au résultat du second tour de l’élection présidentielle anticipée.

« La Tunisie vient de décider sereinement, par la seule voie des urnes, de relancer son chantier de la « révolution » qui s’était embourbé ces dernières années. Si une leçon de l’élection présidentielle du dimanche 13 octobre devait être retenue, c’est bien celle-là : la victoire écrasante de Kaïs Saïed, 61 ans, enseignant en droit constitutionnel à l’allure ascétique, est une réplique sismique du fameux « printemps tunisien » de 2011.

"Il y a bien des manières à lire l’événement. La première est sans aucun doute la satisfaction de voir l’exercice démocratique gagner en maturité en Tunisie(…) Seule ombre au tableau : l’arrestation, le 23 août, du magnat de la télévision Nabil Karoui pour « évasion fiscale » et « blanchiment d’argent ». Qualifié pour le second tour, ce dernier n’a – de fait – pas pu vraiment mener campagne, en tout cas jusqu’à sa libération, mercredi 9 septembre", écrit-il. (…)

Pour le journal français de référence, « l’élection de Kaïs Saïed à la magistrature suprême n’en est pas moins lourde d’interrogations. Partisan d’une véritable révolution institutionnelle, à savoir le renversement de la pyramide des pouvoirs au profit de « conseils locaux » et au détriment de l’échelon central, M. Saïed appelle à se « libérer » de « concepts classiques », parmi lesquels il range les partis politiques et la démocratie représentative. Un tel projet, s’il devait être mis à exécution, annonce bien des tensions. « Un autre motif de perplexité concerne son conservatisme moral et religieux revendiqué », Enfin, le souverainisme de Kaïs Saïed, puisé aux sources du nationalisme arabe – il tient toute relation avec Israël pour un acte de « haute trahison » –, ne manquera pas de crisper les relations entre la Tunisie et ses partenaires occidentaux.

« L’Europe va devoir composer avec cette nouvelle Tunisie qu’elle avait peut-être trop fantasmée à travers le prisme de son paradigme libéral. Kaïs Saïed n’est assurément pas pour elle un candidat de rêve, mais il exprime sans ambiguïté aucune les aspirations de la majorité des Tunisiens », conclut Le Monde.

Lire :

https://www.lemonde.fr/idees/article/2019/10/14/la-victoire-du-conservat...

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