Il y a 55 ans, Habib Bourguiba épousait Wassila Ben Ammar : une femme qui compte
Il y a tout juste 55ans, c’était le jeudi 12 avril 1962, Habib Bourguiba, le président de la république tunisienne épousait en grandes pompes Wassila Ben Ammar. La cérémonie du mariage s’est tenue à la grande salle du palais Essaadaa de la Marsa où officiait le Maire Taïeb Mehiri, le secrétaire d’Etat (ministre de l’Intérieur). En redingote et portant bien en vue la médaille du collier de l’ordre de la République, le Chef de l’Etat avait choisi pour témoin le président de l’Assemblée nationale Jallouli Farès. Wassila Ben Ammar portait elle une cape argentée au dessus d’une fouta et blouza traditionnelle. Son témoin était Béhi Ladgham, le Secrétaire d’Etat à la présidence et à la défense nationale (l’équivalent du Premier ministre).
Tous les membres du gouvernement, du bureau politique du Néo Destour, les hauts magistrats, les grands dignitaires du pays et les membres des deux familles étaient présents à cette cérémonie où cameramen et photographes se bousculaient pour immortaliser l’événement.
C’est le maire de la ville qui a reçu les « oui » des deux époux à sa question traditionnelle avant de leur lire les dispositions du Code du Statut personnel sur leurs obligations respectives. Dans un discours, il s’est adressé à Bourguiba pour lui dire que son bonheur est celui du peuple tunisien en entier et que pour chef d’Etat qu’il est il a aussi droit à retrouver chez lui son âme sœur. Quant à Wassila, il a rappelé son passé militant aux côtés de Bourguiba et de ses compagnons et lui a dit que le peuple lui confie le plus illustre de ses enfants pour qu’elle soit la gardienne de son bonheur. Après cela les deux époux ainsi que leurs témoins ont signé les registres de l’Etat civil.
Mais la cérémonie ne s’arrête pas là. Puisque tout de suite après ce fut autour du Mufti de la République le Cheikh Fadhel Ben Achour de faire lui aussi un discours en vue de bénir le mariage. Après la remise par le Maire au couple Bourguiba du un contrat de mariage, tous les présents ont serré la main ou donné l’accolade aux nouveaux époux. La journée s’acheva par une fête donnée au palais et à laquelle ont pris part des chanteurs et des troupes musicales.
Depuis ce jour-là et jusqu’à leur divorce en août 1986, Wassila Bourguiba, la Première Dame du pays connue par tous sous le nom de « Majda »( la vénérée ou la glorieuse) a été un personnage important de la scène politique tunisienne. Née en 1912 à Béja, Wassila fille de l’avocat Mhamed Ben Ammar appartenait à une branche relativement désargentée d'une famille de la bourgeoisie tunisoise.
Sa première rencontre avec Habib Bourguiba date du 12 avril 1943 d’où le choix de la date du mariage. Wassila était venue le féliciter de sa libération après cinq ans de détention, après les événements sanglants du 9 avril 1938. « Ce fut le coup de foudre », comme l'écrit Bourguiba dans son autobiographie « Ma vie, mon œuvre ». Wassila était déjà mariée , à cette époque, et avait une fille d'un petit propriétaire terrien.
Wassila devient peu à peu très influente dans les affaires du palais même si, en apparence, Bourguiba la tient à l'écart des affaires politiques. Pour l'ancien ministre Tahar Belkhodja qui était parmi ses proches, elle est celle « chez qui faisaient antichambre les premiers ministres et tous les collaborateurs du président ».
Ainsi elle se montra solidaire du Premier ministre Hédi Nouira dans son opposition au projet d’union avortée entre la Tunisie et la Libye signé par Bourguiba et Kadhafi à Djerba le 12 janvier 1974. C’est elle qui favorisa la nomination de Mohamed Mzali à la primature début 1980 alors que Mohamed Sayah était pressenti.
Elle était aussi le principal artisan de l'installation à Tunis du quartier général de l’OLP et de son Chef Yasser Arafat après leur évacuation de Beyrouth en 1982. C’est son éloignement du Palais de Carthage qui a permis à la nièce du président Saïda Sassi d’avoir de l’emprise sur un Bourguiba vieilli et sénile. Le 11 août 1986, coup de théâtre Habib Bourguiba annonce brusquement le divorce avec Wassila par un simple communiqué, alors que celle-ci se soigne depuis plusieurs mois aux Etats Unis.
Wassila s'installe par la suite à Paris. Au lendemain de la destitution de son ancien époux, la presse annonce qu'elle avait adressé à Ben Ali un message « exprimant sa confiance en la nouvelle direction politique » et « sa satisfaction pour les égards rendus à l'ancien président ». Après deux ans et demi d'absence, elle regagne définitivement la Tunisie en juillet 1988.
De Monastir où il a terminé sa vie, Bourguiba aurait tenté de la revoir mais elle s’y refuse. Elle décède le 22 juin 1999 et , contrairement à la première épouse du président Mathilde-Moufida , elle n'est pas inhumée dans le mausolée Bourguiba à Monastir.
Habib Bourguiba et Wassila Ben Ammar ont adopté une fille Hajer Bourguiba. Wassila est la sœur de l’ancien ministre et ambassadeur Mondher Ben Ammar. Elle est la tante du producteur de cinéma Tarek Ben Ammar. Elle était aussi l’arrière-grand- mère maternelle de Yasmine Tordjman qui avait épousé un ancien ministre français Eric Besson.
RBR
Votre commentaire