Le 60ème anniversaire de la République : une atmosphère morose et des festivités à minima

Le 60ème anniversaire de la République : une atmosphère morose et des festivités à minima

 

La Tunisie fête ce mardi le 60ème anniversaire de la proclamation de la République. Le 25 juillet 1957, l’Assemblée nationale constituante, élue en mars 1956 pour mettre au point une constitution du nouvel Etat indépendant décide d’abolir la monarchie, de proclamer le régime républicain et de désigner le président du conseil Habib Bourguiba premier président de la République tunisienne.

C’était de tous les points de vue, une journée historique. Les représentants du peuple décidaient au grand jour et après un débat animé de mettre fin au régime monarchique, de retirer au Bey Mohamed Lamine toutes ses prérogatives et de confier le pouvoir au leader légitime de la Nation, Habib Bourguiba.

Il faut se remettre dans l’atmosphère de l’époque pour se rendre compte de la signification de cet acte du peuple souverain. Alors que dans d’autres contrées les rois sont déposés dans le sang et contraints de quitter leur pays par la force au prix de coups d’état d’une violence inouïe fomentés par des militaires en mal de notoriété, la Tunisie donne une leçon de civilisation et de culture politique d’un grand et vieux pays.

On épiloguera certes longtemps sur le sort réservé au dernier souverain husseinite, placé ainsi que les membres de sa famille en résidence surveillée dans des conditions pour le moins indignes de son rang, mais personne ne peut contester que la monarchie était tombée comme un fruit pourri et que la reprise en main par le peuple de sa souveraineté s’inscrivait dans le sens de l’histoire.

D’ailleurs, si certaines voix s’élèvent pour réclamer la réhabilitation de la dynastie qui a régné sur le pays pendant deux siècles et demi, surtout que de nombreux souverains ont marqué leur passage par des actes de courage et de patriotisme indéniables, personne y compris parmi les héritiers des husseinites n’a jamais remis en cause le régime républicain.

Il faut dire  d’ailleurs que Lamine Bey avait accédé au trône dans de très mauvaises conditions. La déposition dans des circonstances troubles et pour des raisons injustes de son prédécesseur le très populaire Moncef Bey, le souverain patriote ne lui a pas pavé la voie. Bien au contraire, tout s’était ligué contre lui, y compris le conflit Bourguiba-Ben Youssef qui avait aggravé la méfiance du premier. Le président du Néo Destour au faîte de sa gloire  et qui allait cueillir les fruits de l’indépendance chèrement acquise ne pouvait partager le pouvoir avec qui que ce soit.

Il reste aux historiens de faire le tri entre les bons et les mauvais souverains de la dynastie husseinite. Il leur reste aussi de jeter le bon éclairage sur cette période importante de l’histoire nationale qui va de l’accession de Moncef Bey au trône à l’abolition de la monarchie qui jusqu’ici a été escamotée par le régime de Bourguiba puis par celui de Ben Ali qui avaient œuvré d’une manière consciente ou inconsciente à faire oublier cette période où l’émotionnel le dispute au rationnel rendant une lecture objective malaisée.

Evidemment un soixantième anniversaire mérite des festivités de grande ampleur. Ce n’est pas le cas pour des raisons que l’on peut comprendre. Dans une atmosphère morose à tous les points de vue, de grandes festivités auront-elles été mal perçues surtout qu’elles auront conduit à des dépenses malvenues dans l’état où se trouvent les finances publiques.

Mais une célébration à minima a de quoi troubler et interpeller les Tunisiens. Cette date clef dans l’histoire nationale mérite mieux que ce qu’on lui a réservé ces dernières années. A qui la faute ? La question mérite d’être posée. Jusqu’ici les commémorations sont l’œuvre des communes, des autorités régionales ou d’institutions de l’Etat à l’image de la présidence de la République.

Il est temps que l’on confie la célébration des grands moments de la mémoire nationale à une instance publique rattachée soit à la présidence de la république soit à la présidence du gouvernement dont le rôle serait de préparer le programme des festivités longtemps à l’avance pour les mettre à l’abri de l’oubli ou de l’improvisation.

RBR

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